Des cigarettes bon marché au détriment de notre santé

La Commission européenne souhaite relever et étendre les droits d’accise applicables aux produits contenant de la nicotine. Plusieurs États membres – dont le Luxembourg – s’y opposent.

13 octobre 2025
Des cigarettes bon marché au détriment de notre santé

L’Union européenne s’apprête à franchir une étape importante : elle envisage de réviser la directive européenne sur la taxation du tabac, d’augmenter les taux minimaux d’accises sur les cigarettes, le tabac à rouler et les cigares, et d’étendre ces taxes aux nouveaux produits tels que les cigarettes électroniques et les sachets de nicotine. Une réforme largement attendue : les taux actuels datent de 2010. Comme le souligne la Commission, les niveaux nationaux moyens dépassent déjà largement les minima européens. Par conséquent, le taux plancher de l’UE a « perdu de son efficacité lorsqu’il s’agit de réduire durablement la consommation de tabac ». Les études le confirment : une hausse des prix reste l’un des moyens les plus efficaces – sinon le plus efficace – pour lutter contre le tabagisme.

Parallèlement, l’industrie du tabac inonde le marché de nouveaux produits, souvent conçus pour séduire un public jeune. Le commissaire européen chargé de la fiscalité et de l’union douanière, Wopke Hoekstra, a récemment déclaré au média Politico que l’industrie manipule les enfants et les adolescents pour les rendre dépendants, en misant sur des produits aux couleurs vives et aux arômes sucrés. Malheureusement, la régulation européenne peine à suivre le rythme de l’innovation de ce secteur ; plusieurs États membres, comme la France, ont donc choisi d’agir de manière proactive : certains produits ont été interdits et les prix des cigarettes restent volontairement élevés.

Selon plusieurs études, une augmentation de 10 % du prix des cigarettes entraîne une baisse d’environ 4 % de la consommation. Chez les jeunes, cette diminution est encore plus marquée. Le prix demeure ainsi un levier particulièrement efficace pour réduire durablement le nombre de fumeurs.

Le Luxembourg profite de prix du tabac particulièrement bas – mais, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 10 % des décès dans le pays sont liés à la consommation de tabac.

Le Luxembourg, exception européenne : un paradis pour fumeurs

Le Grand-Duché continue de faire figure d’exception. Lors du Conseil européen des ministres de l’Économie et des Finances, vendredi dernier, le ministre luxembourgeois des Finances, Gilles Roth, a certes salué l’élargissement des taux minimaux de taxation aux nouveaux produits nicotiniques, mais il a exprimé de « fortes réserves » quant à la hausse prévue pour les cigarettes et autres produits du tabac. Selon lui, les taux envisagés seraient « excessifs » et iraient à l’encontre de l’harmonisation fiscale européenne. Une position guère surprenante : le ministère luxembourgeois des Finances dépend largement des recettes issues de la vente de tabac pour équilibrer son budget. L’équation est simple : des prix bas entraînent davantage de ventes — y compris transfrontalières — et donc plus de revenus. 

L’administration des douanes estime que les ventes de tabac rapporteront cette année environ 1,6 milliard d’euros, soit près de 5 % des recettes de l’État. Ce n’est pas un hasard si le Tageblatt titrait la semaine dernière sur le « modèle économique du cancer du poumon », toujours solidement ancré au Luxembourg – au détriment de la santé publique. Le ministre des Finances se veut pragmatique : il déclarait en juillet, au micro de Radio 100,7, qu’il ne pouvait pas se passer du jour au lendemain de ces recettes fiscales. Pourtant, le plan de la Commission européenne ne prendrait pas effet immédiatement : il laisserait aux États membres plusieurs années pour appliquer les nouveaux minima. Mais même ce calendrier progressif est bloqué par le Luxembourg – aux côtés de pays comme l’Italie ou la Suède. Et tant que la politique fiscale européenne reposera sur le principe d’unanimité, le chemin risque d’être long. Pourtant, notre santé devrait à elle seule suffire à convaincre.

 

Il est essentiel d’étendre la directive européenne aux nouveaux produits tels que les cigarettes électroniques ou les sachets de nicotine, car ces derniers sont particulièrement prisés des jeunes et leur commercialisation cible délibérément ce public.

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